Beihdja Rahal : Hommage à une riche carrière

     
     
 

Beihdja Rahal, cette interprète à la voix mélodieuse unique, a réussi, comme à l'accoutumée, à rassembler la foule en ce vingt-deuxième jour de Ramadhan. Ils étaient presque tous là, ses proches, ses amis artistes, ainsi que les invétérés mélomanes. L'enjeu de cette soirée était de taille, puisque Beihdja Rahal n'est pas venue se produire sur scène pour interpréter une nouba complète, mais pour être distinguée, par l'ONDA, à l'occasion de la sortie de son coffret de 27 CD. Un travail d'enregistrement du patrimoine musical andalou qu'elle a entamé en 1995.

Comme le veut la tradition dans ce genre d'événements, la soirée a été étrennée par la projection d'un film documentaire de quelques minutes, montrant l'itinéraire artistique de Beihdja Rahal à travers une série de clichés parlants.

L'imposant orchestre de l'association des Beaux-Arts d'Alger, dirigé par le chef d'orchestre et président de l'association, El-Hadi Boukoura, prend ensuite le relais. Les trente musiciens ont présenté un répertoire musical des plus élaborés, rehaussés par des tours de chants individuels, interprété respectivement par Youcef Aït Meziane, Sarah Zitouni, Haroun Chettab, Fatma Zohra Hammouche, Omar Boudellel, Maya Barafane, Nazim Lemnouar et Mehdi Zekri. Les présents ont pu apprécier quelques pièces musicales connues, à l'image de Ya ghazel dabyou' L'hima, Qala li nasseh mine enness, Dir el ôqqar, Ya toura ainsi que Ya men tridktali.

Place ensuite à la remise d'un trophée honorifique, un coffret de CD intitulé «Maître au féminin», et d'un bouquet de fleurs à Beihdja Rahal, par M'Hand Saïd, représentant de l'ONDA. Emue à l'extrême, l'artiste -habillée élégamment par la créatrice Faïza Antri Bouzar- a tenu dans un premier temps à présenter ses remerciements à l'ONDA, ainsi qu'à l'association des Beaux-Arts d'Alger, qui l'ont accompagnée durant cette soirée.

Elle confie par la suite, que c'est un bonheur inimaginable pour elle de tenir son coffret entre les mains. «Je me dis, témoigne-t-elle, que les maîtres qui m'ont appris cette musique ne me l'ont pas apprise pour rien. A travers ce coffret, je leur ai rendu tout ce qu'ils ont fait pour ce patrimoine andalou».

L'artiste prend ensuite place au milieu de l'orchestre de l'association des Beaux-Arts d'Alger, pour venir interpréter magistralement quelques morceaux de la nouba sika, suivis de quelques pièces musicales, exhumées du hawzi et de l'aâroubi.

Elle refermera, hélas, son tour de chant par des chants religieux, et ce, sous des salves d'applaudissements. Pour rappel, Beihdja Rahal a commencé sa formation artistique en 1974 au conservatoire d'Alger sous l'enseignement de Mohamed Khaznadji, Abderrezak Fakhardji et Zoubir Karkachi.

Elle a effectué ses premiers pas en 1982 en tant que musicienne et interprète au sein de l'orchestre El Fakhardjia pendant 3 ans. Elle devient, membre fondatrice, chanteuse soliste et professeur de musique andalouse au sein de l'orchestre Essoundoussia, pour ensuite créer, en 1993, son propre orchestre à Paris.

Elle donne également des cours à des enfants avec l'ELCO (Enseignement de la langue et culture d'origine) et à des adultes au sein de l'association Rythmeharmonie, dont elle fait partie.

Beihdja Rahal a obtenu en 2006 le prix «Mahfoud Boucebci» pour ses travaux de recherche et de sauvegarde du patrimoine musical andalou.

Par ailleurs, Beihdja Rahal a coédité des ouvrages relatifs à la musique arabo-andalouse : La plume, la voix et le plectre, paru en 2008, et La joie des âmes dans la splendeur des paradis andalous, en 2010. Beihdja Rahal s'occupe de la partie musicale et Saadane Benbabaali prend en charge le côté littéraire.

Il est à noter que dans le cadre de la promotion de son coffret, l'artiste Beihdja Rahal entamera, prochainement, une tournée nationale, organisée sous les auspices de l'ONDA. Comme elle nous l'a si bien confié, juste après la soirée, «c'est mon rêve de me produire partout en Algérie. Alger n'est pas l'Algérie, L'Algérie c'est ses 48 wilayas. Chaque wilaya de petites villes et villages.

C'est là qu'il faut aller. Pour leur présenter cette musique et pour leur dire que c'est leur musique. C'est une fierté pour nous, même quand nous nous produisons à l'étranger, pour dire que nous avons une musique algérienne très particulière», dit-elle.

 

Nacima Chabani
"EL WATAN" mercredi 29 mai 2019