Chants sacrés en Méditerranée, Retentissement des voix célestes
     
     
 

Le récital, prodigieux dans sa dimension spirituelle, et d’une grande beauté tant le chant était équilibré, gracieux et d’une plasticité musicale particulière. Depuis le 1er octobre, la Méditerranée prête l’ouïe aux chants sacrés, que ce soit des interprétations liturgiques empruntées à la tradition chrétienne, ou des chants mystiques et traditionnels arabes.

Le public algérois, nombreux, a assisté, jeudi, à la salle Ibn Khaldoun, au récital de chants de la renaissance italienne et aux chants arabo-andalous. La première partie a été assurée par le quartette The ring around the quartet, véritable révélation pour l’oreille algéroise. Cet ensemble, composé de quatre jeunes chanteurs italiens, propose à l’assistance de découvrir, à travers le chant, l’émotion, la beauté et la spiritualité.
Les quatre voix, pleines de miséricorde et chargées de religiosité, dégagent, dans une extraordinaire spontanéité, un pouvoir expressif des chants interprétés avec grâce et bonté, les deux revêtent une grande qualité unique et une générosité étonnante.

Le quartette, pour donner du caractère à son chant ainsi que du relief, a privilégié, d’une manière singulière, la diction et la technique vocale: une intonation mesurée et le vocalique rythmé suivant prudemment et ingénieusement les tonalités à forte charge affective. Ce travail intellectuel, tendre et séduisant sur la voix et sur la chant, crée des atmosphères exceptionnelles, aérées, marquées, d’un bout à l’autre, d’une esthétique induisant une écoute riche et variée.

Ensuite, vint le tour de Beihdja Rahal qui, accompagnée de ses quatre musiciens (oud, violon, nay, derbouka), a agréablement joué, comme à l’accoutumée, son rôle sur scène. Près d’une heure, la voix de l’andalou, une voix brumeuse, joliment voilée, a présenté à son public des chants empruntés à la tradition andalouse, des interprétations fortement évocatrices, caractérisées d’une vitalité extraordinaire. La voix et l’instrumentation s’accompagnent conjointement, au fil du temps, dans des attitudes harmoniques.

Et pour finir, Beihdja Rahal et The ring around the quartet ont clôturé, la soirée, en interprétant ensemble un chant andalou. Le récital, prodigieux dans sa dimension spirituelle, et d’une grande beauté tant le chant était équilibré, gracieux et d’une plasticité musicale particulière, a laissé le public médusé, il l’a immergé dans une extrême béatitude.

Euphorie, joliesse, tels sont les vocables qui résument admirablement la soirée de jeudi. Le récital aurait été extraordinairement rehaussé, si les chants avaient retenti dans l’enceinte d’une cathédrale, favorisant, sans amplificateur quelconque, l’écho, l’acoustique. Les chants sacrées ne sont qu’un long voyage à travers la Méditerranée. Il se veut initiatique: une rencontre d’autres gens, d’autres cultures.

Il se veut une quête d’autres musiques, autrement dit, ce cycle, constitué d’une vingtaine d’escales, dont une à Alger, illustre dans la diversité un panel représentatif des genres musicaux qui jalonnent, d’une rive à l’autre, le bassin méditerranéen, lieu de confluences des histoires et des cultures. Il est à noter que ce voyage, à travers toute la Méditerranée, initié par l’association Echanges culturels en Méditerranée (Ecume) et organisé par la délégation de la Commission européenne en Algérie, en partenariat avec l’établissement Arts et Culture de la wilaya d’Alger, se poursuit jusqu’au 18 décembre, où il effectuera une dernière escale à Séville, en Espagne.

Le voyage s’achèvera avec un récital de Takht musical de Tunis, un ensemble de cinq musiciens qui font partie d’une génération d’interprètes qui ont donné une nouvelle dimension à la musique tunisienne en explorant les multiples possibilités des instruments traditionnels tels que le oud ou la derbouka. Ces musiciens interpréteront des chants de cérémonies à la fois symboliques et sacrés.

 

Yacine Idjer
"INFOSOIR" dimanche 5 décembre 2004