Une artiste qui se popularise  
     
     
 

La persévérante Beihdja Rahal dont le nom est sorti du lot il y a à peine quatre ans sera en haut de l'affiche en France à la faveur d'une mini-tournée qu'elle entamera samedi prochain à partir de Marseille.  C'est une première depuis le début de cette année où elle a eu à effectuer d'autres tournées au niveau national grâce au soutien indéfectible et fidèle de l'Office national de la culture et de l'information (ONCI). A Marseille, la chanteuse est programmée au théâtre de l'œuvre, puis dès le 12 octobre elle sera successivement en Haute Provence et au théâtre du Rocher à la Garde. Le 16 octobre prochain, le public de l'Hexagone la rencontrera à Asenal de Metz puis à Nancy où elle se produira les 14 novembre et 12 décembre prochains.

La chanteuse de l'arabo-andalou espère que la musique classique algérienne soit écoutée  et appréciée partout dans le monde, qu'on comprenne la belle poésie, et qu'on connaisse son histoire. Pour elle, l'auditoire-cible n'est pas "nécessairement" la communauté  algérienne vivant en France. "Je chante pour un public qui veut découvrir ma musique, ma culture", a-t-elle expliqué, ajoutant que les villes ou les régions où elle se produit "ne sont pas un choix délibéré". "Je reçois des propositions  de concerts ou de festivals. Je les étudie, puis j'accepte ou je refuse".

L'artiste s'est par ailleurs réjouie de l'audience "grandissante" qu'elle  ne cesse d'avoir. "Lorsque j'ai entamé ma carrière musicale en France, le public ne me connaissait pas, même le public algérien venait pour découvrir ma musique,  ma voix, mon interprétation. Depuis quatre ou cinq ans, les salles sont pleines  et je peux parler d'un public qui se déplace pour moi et c'est ce qui m'encourage  à aller de l'avant",  s'est-elle félicitée.

Artiste confirmée, Beihdja Rahal vit en France depuis une vingtaine  d'années, dédiées en grande partie à la musique. "Je me consacre pleinement  à ma musique. Je gère moi-même ma carrière artistique", a-t-elle dit, ajoutant  que "quand on est professionnel, on n'attend pas d'être parrainé". "On répond présent lors de festivals internationaux pour que la musique  algérienne soit représentée en essayant de donner la meilleure image", a-t-elle  conclu.

Une femme dans une arène d'hommes

Beihdja Rahal, l'hardie chanteuse, l'une des rares à avoir pénétré l'univers exclusivement masculin de la musique andalouse était l'an dernier à l'affiche du Palais de la Culture Moufdi Zakaria de Kouba ensuite au Mouggar le 07.  Le 5 février 2010 elle s'est produite à l'Institut du monde arabe avec un master-class débat, et un mini-concert tandis que le 26 mars elle était au Centre culturel algérien de Paris.

A la salle El Mouggar et à la faveur du mois de ramadan dernier, elle s'est produite en présentant en exclusivité une autre spécialité que la sienne à savoir le Aroubi, le Hawzi et même le Medh, pour toucher certainement plus de monde.

La dernière nouba qu'elle avait mise dans les bacs, s'appelle Nouba Sika 2, et la chanteuse prépare une autre surprise pour le mois de février prochain, surprise qui sera accompagnée certainement de concerts ou de tournées pour la promotion de son produit. Rappelez-vous, Beihdja Rahal s'est attelée depuis 1995 à sauvegarder le patrimoine musical andalou en enregistrant nouba sur nouba, du moins celles qui restent encore dans les mémoires de grands interprètes connus pour détenir l'authenticité du rythme de ce genre musical.

Ce travail entamé sous l'œil vigilant du maître, Ahmed Serri, n'est pas encore à son bout. La première nouba qu'elle a ainsi sauvée de l'oubli, elle l'a enregistrée en 1995, dans le mode Zidane.  Il y a deux ans, Beihdja Rahal avait présenté un album dans le mode Raml. Ce dernier qui entre dans le cadre de l'enregistrement des 12 noubate restantes -il y en avait 24 au départ-, fait partie de sa deuxième série de nouba.

A l'origine, il existait 24 noubate, chacune composée dans un mode défini. Il n'en reste actuellement plus que 11 au Maroc, 16 en Algérie (dont 4 inachevées) et 13 en Tunisie. Chaque nouba correspondait à une heure de la journée et se divisait en une suite de plusieurs pièces de rythmique différente. En général, les mouvements de la nouba s'enchaînent en accélérant progressivement le tempo, jusqu'à la dernière pièce, plus lente, destinée à l'apaisement.

La nouba sur le mode Raml que Beihdja Rahal avait enregistrée comporte huit titres, dont un istikhbar Zidane tiré de la poésie d'Ibn Zeydoun et un betaïhi Raml inédit. L'artiste a d'ores et déjà achevé sa première série de 12 noubate, sauf qu'après, viendront des noubas dans les modes Mezmoum, Rasd et Zidane de la deuxième série de noubate entamée en 2005.

L'interprète a toujours regretté la mauvaise distribution de ces albums surtout à l'intérieur du pays. Selon elle, de nombreux fans lui ont adressé des messages l'informant de la difficulté ou parfois de la non disponibilité de ses produits chez les disquaires locaux.

"La distribution est mal faite, elle devrait être nationale et pas seulement dans la capitale. Le public se trouve dans tous les coins du pays et cette musique doit être proche du peuple", avait-elle soutenu, ajoutant que ce n'était pas de son ressort de "trouver des solutions pour cela, moi je ne suis qu'une artiste-interprète, mon rôle principal consiste en la contribution à la sauvegarde de ce patrimoine musical avec tout ce qu'il comporte comme textes, musiques et modes, et le promouvoir afin que le grand public s'intéresse à cet art ".

Beihdja Rahal qui était une parfaite inconnue du public au début des années 90 est devenue, moins d'une décennie plus tard, une véritable vedette de ce genre classé chez nous, "musique andalouse classique."

 

Rebouh H.
"LE MAGHREB" mercredi 6 octobre 2010