Interview exclusive
     
     
 

Les éditions Soli Music viennent d’éditer un coffret inédit de musique andalouse, composé de deux K7 offertes en promotion et de neuf CD de noubate, enregistrées par Beihdja Rahal en Algérie depuis près d’une dizaine d’années. Un coffret qui n’englobe pas la totalité des noubas andalouses même si Beihdja Rahal a fait “le tour des 12 modes, certes, mais je n’ai pas enregistré tout le patrimoine”. Mais “une satisfaction personnelle de savoir que le premier coffret commercialisé dans ce domaine est le mien”, selon cette jeune interprète qui espère “faire découvrir et aimer cette musique à un large public qui ne la connaît peut-être pas”.

 

Soli Music vient d'éditer un coffret de noubate andalouses, signées Beihdja Rahal. Une initiative inédite, certes. Pourquoi ce coffret ? Y aura-t-il un autre ? L'objectif est de perpétuer, à votre manière, le patrimoine andalou. Qu'en pensez-vous ?

Une initiative inédite dans la musique classique andalouse, oui, si l'on parle de chanteurs. Il existe des coffrets de ce genre mais c'est la première fois qu'on commercialise un travail de ce genre pour un seul interprète. Je suis très à l'écoute de la demande du public, j'ai souvent entendu dire qu'il souhaitait posséder la compilation de toutes mes noubas. J'en ai parlé avec Soli Music qui n'a pas hésité à prendre en charge le projet. Nous avons commence à le préparer depuis le mois de juillet et voici le résultat.

Lorsque j'ai commencé à enregistrer en 1995, c'était juste par plaisir, je rêvais de voir mes albums chez les disquaires. Je ne pensais pas vraiment à la sauvegarde du patrimoine, je pensais plus à l’esthétique. Je suis arrivée à mon 4e puis 5e CD, j’ai eu d’autres idées, d’autres objectifs en tête. C’est à partir de là que le vrai travail a commencé : pourquoi ne pas faire le tour de tous les modes existant dans la çanaâ. Vous savez très bien qu’il existe des modes moins riches que d’autres, c’est pour cela qu’avant de les enregistrer, il fallait aller à la recherche de certains morceaux, soit inédits, soit très peu connus, voire disparus.

Perpétuer le patrimoine andalou ? Je n’ai pas cette prétention. Les maîtres de ce genre sont encore vivants, je ne suis qu’une jeune interprète qui espère faire découvrir et aimer cette musique à un large public qui ne la connaît peut-être pas. Je suis quand même très honorée de savoir que dès qu’on pense à la musique andalouse, mon nom vient tout de suite à l’esprit. Il faut savoir que ce coffret n’englobe pas la totalité des noubas andalouses ; vous savez très bien que j’ai fait le tour des 12 modes, certes, mais je n’ai pas enregistré tout le patrimoine. C’est quand même une satisfaction personnelle de savoir que le premier coffret commercialisé dans ce domaine est le mien.

 

Vous avez animé jeudi un récital avec un quatuor de solistes italiens, dans le cadre d'un festival de chants sacrés en Méditerranée. Une fusion entre les chants liturgiques de la ligurie et le patrimoine andalou et aroubi national. Comment avez-vous vécu ce rapprochement ? Une manière d'intéresser les Occidentaux à notre musique ou une volonté de votre part de vous ouvrir l'autre ?

C'est un peu les deux. Je ne suis, certainement, pas la première a avoir tente un tel rapprochement, mais ça reste très enrichissant a chaque fois que l'occasion se présente pour moi. J'ai travaille il y a quelques années avec Radio Tarifa et Juan Martin, tous les deux espagnols, puis avec l'orchestre philharmonique du conservatoire de Rouen. Il y a une idée de "partage", en plus de cette fusion, qui nous permet de nous ouvrir au monde occidental. Le plus important pour moi dans ces expériences est de faire découvrir ma musique a l'autre, car il ne faut pas oublier que l'Algérien connaît pratiquement toutes les musiques mais l'Occidental ne connaît pas systématiquement notre musique, encore moins la musique classique algérienne.

 

Quels sont vos projets ? Une autre nouba ? Sans déflorer la surprise et le plaisir...

Certainement. Pour le public, il n’y a plus de surprise, mais du plaisir j’espère. Le concert que j’ai donné à Alger le 2 décembre est le dernier de l’année 2004. Je me consacre déjà à la préparation de la prochaine nouba à enregistrer. J’ai commencé à faire un choix de morceaux, mais rien n’est arrêté définitivement. Je continue à assurer des cours de musique andalouse au Centre Culturel Algérien de Paris en plus de mes interventions dans des lycées, collèges, instituts pour parler de la çanaâ

 

Propos recueillis par Chérif Bennaceur
"LE SOIR D'ALGERIE" mardi 7 décembre 2004