Une élégance vocale  
     
     
 

L'élégance vocale contribue immensément à faire valoir, dit-on, tout genre musical quel qu'il soit d'autant que le chant arabo-andalou est déjà beau par essence. Et c'est ce que vient de confirmer Beihdja Rahal lors de son concert donné, dimanche dernier, au palais de la culture Moufdi-Zakaria où elle a, encore une fois, brillé par une prestation de belle facture.

Pour un public acquis à la cause musicale chère à Ziryab, Beihdja Rahal a choisi comme entrée en matière une nouba raml avec ses plus belles pièces à l'image du b'taïhi, Hel ra'eyt chems el assil ou le khlass alif, Aliftou el bouka baâda el habib (je me suis familiarisé aux pleurs après le départ de l'amie) qui est une seyante poésie dont chaque vers commence par hourouf el abdjadia ou l'alphabet arabe.

Un enrichissement que l'interprète Beihdja Rahal a voulu greffer au corpus arabo-andalou pour étendre davantage sa luxuriance et sa grâce lyrique. Et c'est tant mieux pour elle car elle a pu séduire une assistance très réceptive aux nuances imagées d'une poésie qui a de tout temps charmé aussi bien les néophytes que les avertis.

La première partie du spectacle ayant terminé sur des intonations de youyous emplissant sacrément la salle, Beihdja entamera la deuxième fraction de son récital par un inqilab moual intitulé Nahwa ghouziyel (j'affectionne une petite gazelle) avant de pénétrer dans le style aroubi avec une poésie d'anthologie qui a pour titre Ma sebt memhoun nech'tekilou eb-daya (je n'ai point trouvé un éploré pour lui conter ma peine). Ce poème qu'on attribue à Sidi Ali M'barek, saint tutélaire de Koléa, est un chant mystique que le soufi Sid Ali M'barek dédie au Prophète Mohamed (QLSSL).

Beihdja Rahal change ensuite de mode pour aborder un autre type du répertoire arabo-andalou. Et c'est le mode appelé djarka dont les pièces de la nouba ont complètement disparu pour n'en rester que les insirafate comme Ya mokhdjil echems ouel hilal (ô toi qui rend timide le soleil et la lune) qui sera interprété.

Bien exécuté par l'artiste et par l'orchestre, Beihdja clôture la soirée avec le registre panégyrique dont la poésie Besme Illah El Aâdham qu'on dit de Sidi Lakhdar Benkhlouf (XVIe et XVIIe siècles) et une série de chants lyriques puisés dans le domaine appelé r'haoui.

C'est dire que la voix féminine a, à travers Beihdja Rahal, réjoui comme le faisaient en leur temps maâlma Yamna Ben El Hadj El Mahdi et cheikha Tetma, un parterre dont le souvenir de la prestation ne s'estompera pas de sitôt.  

 

M. Belarbi
"LE SOIR D'ALGERIE" jeudi 25 septembre 2008