« Je suis interprète par plaisir et passion »  
     
     
 

Une mini-tournée nationale attend l'artiste qui lui permettra, dit-elle, de connaître son public de l'intérieur du pays, une première pour elle... Fidèle au rendez-vous, l'interprète de musique classique algérienne suivant la composition de la nouba, Beihdja Rahal, a animé, hier, à la salle El Mougar une conférence de presse à l'occasion de la sortie aux éditions Belda diffusion de la nouba sika, la cinquième du genre dans la seconde série des 12 noubas enregistrées jusque-là.

Un 18e opus qui ne contient pas de morceaux inédits (mafqoud) mais plutôt des textes rarement chantés et que Beihdja se plaît, comme à chaque fois, à remettre au goût du jour. Et de faire indiquer que l'Istikhbar de la plage 5 est un «Istikhbar soufi». Autrement, toutes ces kaçaïde sont répertoriées mais rarement chantées. Cet album contient en ouverture une présentation du livre déjà sorti aux éditions Barzakh, intitulé, La plume, la voix et le plectre, signé par Sofiane Hadjadj.

Ce livre répond à tous les questionnements que pose le public à la chanteuse, d'après elle. «Il est une forme de réponse collective pour les non initiés à la musique andalouse, faisant référence à son historique, l'évolution des mouachah, tout en citant quelques exemples de poètes qui ont marqué le siècle dans cette musique.» Comme à l'accoutumée, c'est le docteur en littérature arabe, Saâdane Baba Ali à qui échoit le rôle de traduire les textes en français.

A propos de son métier d'aujourd'hui, Beihdja Rahal fera remarquer qu'elle emploie sur scène avec son public, la même méthode que lorsqu'elle était enseignante de sciences naturelles, c'est-à-dire qu'elle fait toujours en sorte que son auditoire quitte la salle en ayant compris «la leçon» voire des éléments de sa musique, son travail et donc son amour pour préserver ce patrimoine qu'est la musique andalouse. Un métier qu'elle dit exercer «par plaisir personnel et passion pour cette musique».

Et de confier à ses détracteurs: «Ma musique marche bien, pour preuve, la dernière nouba raml, d'après mon éditeur, s'est très bien vendue. Tant que le public vient et dépense de l'argent pour assister à mes spectacles et demande de la qualité, cela me donne de l'énergie pour continuer à chanter. Les salles sont en général archicomble. Allez demandez à Belda diffusion si nouba raml s'est bien vendue ou pas. Le public est le baromètre. Tant que je peux donner ma voix pour la musique andalouse, je le ferai. J'ai plus envie de chanter seule et pas en duo...»

Côté actualité, Beihdja Rahal compte donner un concert à la salle El Mougar, jeudi, à partir de 20h. En collaboration avec l'Onci, une tournée nationale l'attend, qui la mènera dans six villes du pays, à savoir, le 23 février à Boumerdès, le 24 à Médéa, le 26 à Bordj Bou Arréridj, le 27 à Oum El Bouaghi et le 1er mars à Cherchell. «Cela me permettra de connaître mon public de l'intérieur du pays, ce sera une première pour moi.»

Beihdja Rahal notera qu'un second livre sortira prochainement après La plume, la voix et le plectre. Ce nouvel ouvrage portera sur les poètes et la poésie. Pour répondre à ceux qui lui reprochent de ne pas innover en la matière, Beihdja Rahal est catégorique: «Mon rôle est de préserver le patrimoine, tout comme un chef d'orchestres avec sa baguette, il ne dirige que de la musique classique. Alors si pour vous, je ne suis pas artiste car je ne crée pas, eh bien oui, je suis interprète et pas artiste!», dit-elle au second degré, un peu agacée.

Une réponse cinglante à une question mal formulée par un journaliste zélé qui croyait bien faire. Il est vrai, que la nouvelle génération ne s'intéresse pas beaucoup au patrimoine et aux choses anciennes. L'exemple de ce journaliste, en atteste largement, hélas!

 

O. Hind
"L'EXPRESSION" mardi 17 février 2009