Beihdja Rahal, Chanteuse arabo-andalouse

     
     
 

A travers mes albums, je mène un travail pédagogique : La diva de la chanson andalouse Beihdja Rahal revient avec deux albums. Rencontre avec cette passionnée de la musique andalouse.

 

Vous venez de sortir en l'espace d'un mois un double album en France et un autre en Algérie ...

Oui, un double album est sorti au début du mois de février en France, édité par l'Institut du monde arabe à Paris. Il contient deux noubas, Mdjenba et Mezmoum, déjà parues en Algérie en 2005. L'album Nouba Dil, lui, vient de paraître en Algérie. C'est une nouba que j'ai enregistrée en décembre 2010, édité chez Belda éditions. L'album est sponsorisé par Air Algérie, Nedjma et l'ONDA.

 

Dans  votre dernier album, le vingtième, en l'occurrence, Nouba Dil, vous proposez des pièces que vous chantez pour la première fois dans ce mode.

L'inqilab de cet album est un inédit. La poésie du mceddar a été complétée. Généralement, on ne chante que les deux premiers vers, j'ai interprété le poème dans sa totalité. L'insiraf 2 est inédit et nous avons rarement l'habitude d'écouter le khlass dans cette forme. Attention, je n'ai rien créé ni innové, je reste dans la tradition pure d'interprétation des pièces comme elles ont été classées.

 

Vous avez toujours soutenu que la musique andalouse est à la fois un patrimoine  national immatériel et matériel qui doit être enseignée partout et surtout protégée ...

Nous avons vu la création d'un nombre important d'associations musicales ces dernières années, c'est une très bonne chose, car c'est ce qui aidera à la transmission de ce patrimoine aux générations futures. Comme tout patrimoine doit être protégé, il faut encadrer ces associations et les aider à promouvoir cet art ancestral dans sa bonne version. Il ne faut pas qu'elles se sentent isolées. Un chef d'orchestre ne doit pas travailler et décider seul d'une version à donner à ses élèves, il a la responsabilité d'identifier chacune des pièces à transmettre. C'est de cette manière que nous arriverons à sauvegarder toutes les noubas qui nous sont parvenues.

 

Justement,  pour préserver ce patrimoine, vous vous êtes lancée depuis 1997 dans l'enregistrement d'une partie de ce patrimoine musical ...

Au départ, mon souhait était d'éditer deux ou trois noubas par plaisir. Ça a marché, l'accueil du public a dépassé mes espérances, j'ai décidé de continuer. J'ai eu la chance d'être formée par des professeurs et maîtres qui m'ont beaucoup transmis, je voulais faire partager mes connaissances par un large public qui est demandeur. Je ne prétends pas connaître tout le patrimoine mais j'essaie d'enregistrer tout ce qui est en ma possession. Je me consacre totalement à cette passion que j'essaie de passer au public. Je pense que c'est aussi un travail pédagogique, car en éditant mes albums, j'explique et je classe des pièces, des modes pour que ce ne soit plus un domaine réservé aux initiés.

 

Vous accordez également un grand intérêt à l'écriture puisque vous avez coédité plusieurs ouvrages ayant trait à la musique andalouse ...

La plume, la voix et le plectre a été édité en décembre 2008 par Barzakh, La joie des âmes dans la splendeur des paradis andalous a été édité en novembre 2010 par l'ANEP. Le premier ouvrage a très vite été écoulé, on attend de le rééditer. Avec Saadane Benbabaali, on a tout de suite pensé à un deuxième opus, qui a bien marché aussi. Le public est en manque d'ouvrages de ce genre. Il apprécie la musique andalouse, mais n'a pas beaucoup d'éléments pour pénétrer ce monde merveilleux de sa poésie dans toutes ses formes, de son histoire… Saadane travaille sur toute la partie littéraire et moi sur la partie musicale.

 

Peut-on parler de relève aujourd'hui avec toute cette prolifération d'associations musicales andalouses ?

Bien sûr et heureusement. Je l'ai constaté en allant rendre visite aux associations à chaque fois que l'occasion se présentait. Les talents sont là, ils ne demandent qu'à être pris en main et encouragés sans brûler les étapes. C'est une musique où la formation demande des années de patience et de rigueur.

 

Des projets en cours ?

J'ai un concert le 7 mai à Bruxelles, je serai le 9 juin au Centre culturel algérien de Paris avec Saadane Benbabaali pour présenter notre  ouvrage. Le 23 juin je donne un concert à Nancy, en plus des masters class que j'anime régulièrement dans cette ville. Je continue également à donner des cours de chant et de musique à l'ELCO et au sein de notre association Rythmeharmonie.

 

Nacima Chabani
"EL WATAN" vendredi 4 mars 2011