C'est la musique andalouse qui me passionne

     
     
 

 

Installée en France depuis plus de vingt ans, la chanteuse d'andalou, Beihdja Rahal a enregistré plus d'une vingtaine de CD et DVD et se produit régulièrement en Algérie, que ce soit dans des représentations ou pour y chercher de l'inspiration. C'est justement lors de son voyage à Montréal, où elle s'est produite à l'occasion du 10e Gala de la Fondation Club Avenir, qui récompense l'excellence des Algériens établis au Canada, que l'artiste a bien voulu se confier.

 

Pouvez-vous nous parler de votre parcours et la manière de concilier votre métier de chanteuse et de professeur de musique ?

Au départ, lorsque j'étais en Algérie, j'avais eu une formation de biologiste et la musique n'était qu'un loisir. Par la suite, lorsque je me suis installée en France, en 1992, il m'a fallu faire un choix et c'est la musique que j'ai choisi de faire, car le statut de l'artiste existe en France et que l'on peut vivre de la musique. En ce qui concerne mon emploi du temps, je le gère en donnant des cours pendant la semaine et je m'arrange pour donner des concerts de temps en temps un peu partout dans le monde et même en Algérie pendant les week-ends. Quant aux enregistrements, je les programme toujours pendant les vacances scolaires pour ne pas léser les élèves et ne pas affecter mes cours.

 

Est-ce que le métier de chanteuse andalouse vous a apporté toutes les satisfactions auxquelles vous aspiriez ?

J'ai eu beaucoup de satisfaction ! J'espère qu'il y en aura beaucoup d'autres d'ailleurs, car le fait de vivre de sa musique c'est très beau. Pour moi, quand je vais au travail c'est avant tout un plaisir et une satisfaction. D'ailleurs, lorsque j'enregistre un album ou lorsque je fais un concert, je n'ai pas l'impression d'être au travail, même si l'on fournit beaucoup d'efforts, d'énergie et de concentration… mais c'est tellement agréable !

 

La musique andalouse est perçue comme étant une musique savante de nos jours. Comment pensez-vous la faire vivre en dehors des manifestations culturelles ?

C'est vrai que lorsque l'on parle de musique andalouse, il faut l'étudier au conservatoire et avoir un maître de musique. Musique savante ne veut pas dire musique morte non plus. Pendant longtemps on avait tendance à associer la musique andalouse à une musique bourgeoise. Par contre, elle continue à être transmise et à drainer beaucoup de jeunes qui veulent l'apprendre et la découvrir. Je le vois à travers mes concerts et les messages que je reçois. J'ajouterai d'ailleurs que si j'en suis à mon 23e album, c'est parce qu'il y a une demande de la part du public et cela de l'avis même de mes éditeurs qui s'empressent de me commander de nouveaux albums.

 

Est-ce que vous êtes tentée de changer de registre musical ?

Non, pas du tout. La musique andalouse est une passion pour moi. Lorsque je chante la nouba, je me fais plaisir avant de faire plaisir au public et je pense que c'est ce plaisir que je transmets. C'est par passion que je chante l'amour et c'est la musique andalouse qui me passionne.

 

On connaît la chanteuse, mais pas l'écrivain. Pouvez-vous nous parler des deux livres que vous avez édités ?

Je n'ai pas la prétention d'être écrivain. Les livres ont été écrits en collaboration avec le Dr Saadane Benbabaali qui est professeur de littérature arabe à Paris III et spécialiste du «mouashah andalous». Nous avons mis en commun nos deux savoirs pour éditer les deux ouvrages sur la poésie andalouse. Le professeur Benbabaali s'est occupé de toute la partie littéraire et la traduction des deux livres la Plume, la Voix et le Plectre, et la Joie des âmes dans la splendeur des paradis andalous. Quant à moi, je me suis occupée de la partie musicale. Les ouvrages ont la particularité d'être écrits en français et en arabe, ce qui permet de les lire dans les deux sens.

 

Pourquoi avoir choisi de faire un site web et pas de page Facebook ?

J'étais l'une des premières artistes en Algérie à avoir un site web personnel. D'ailleurs, j'ai deux adresses mails où les fans peuvent m'écrire. Par contre, je n'ai pas de page Facebook parce que je trouve que c'est vraiment impersonnel. Je trouve que c'est virtuel et je ne pourrai pas parler avec des milliers de personnes que je ne vois pas… J'aime bien aussi le contact. Donc, si quelqu'un m'écrit par courriels je réponds, et une réponse peut rester personnelle.

 

Entretien réalisé par Réda Benkoula
"LE TEMPS" mardi 12 novembre 2013